Accueil > Médias > Blog

Créateurs, artistes et artisans : de qui parle-t-on ? 2ème partie : le régime fiscal de l’activité de création

publié le 24 janvier 2020   auteur: corine  1552 lectures

La 1ère partie de cet article évoquait la qualité de créateur, artiste et artisan...
.

Deuxième partie : le régime fiscal de l’activité de création

Le statut fiscal de l’activité créative évolue en fonction du montant des revenus et de leur classification fiscale :

  • bénéfices industriels et commerciaux pour les activités proprement commerciale, industrielle ou artisanale (15) ,
  • bénéfices non commerciaux pour les autres activités (formation par exemple),
  • droit d’auteur.

En période de démarrage, selon la nature de l’activité, il faut déclarer ses revenus comme bénéfice industriel et commercial (BIC) ou comme bénéfice non commercial (BNC) et recourir aux avantages de la comptabilité car le chiffre d’affaire pris en compte sera différent selon son mode de calcul :
> BIC : comptabilité d’engagement – tout est compté, même les engagements qui ne se sont pas traduits par un mouvement bancaire,
> BNC : comptabilité de trésorerie – seuls sont comptabilisés les mouvements bancaires.
.

.

A/ Pour les revenus d’activité considérés comme BIC

Le régime fiscal de la micro-entreprise (régime dit micro-fiscal pour les BIC) s’applique à une entreprise individuelle (16) qui ne dépasse pas un chiffre d’affaire de 170 000 € pour les ventes ou achat-revente de marchandise et 70 000 € pour les prestations de service (17).
.
L’imposition porte sur un chiffre d’affaires qui n’est pas le chiffre d’affaires réel mais une partie seulement de celui-ci, après abattement d’une part de ce chiffre d’affaires. Cet abattement s’élève à 71 % pour les revenus de vente et à 50 % pour les autres revenus commerciaux (prestations de services)(18) . Cela signifie que le chiffre d’affaires sur lequel pèse l’impôt égale respectivement 29 % ou 50 % du chiffre d’affaires réalisé, mais il n’égale pas le résultat réel.
.
Recourir au régime micro-fiscal autorise une comptabilité de trésorerie simplifiée tout au long de l’année pour les bénéfices industriels et commerciaux (19) .
En outre, ce régime micro-fiscal permet, si le choix en est fait, de procéder à un versement libératoire (20) de l’impôt sur le revenu assis sur le chiffre d’affaires. Dans ce cas, l’impôt est payé l’année de perception des revenus selon un montant déterminé par application d’un taux forfaitaire sur le chiffre d’affaires et permet ainsi d’être dispensé (libéré) l’année suivante du paiement de l’impôt pour cette année d’activité.

Au-delà des seuils de chiffre d’affaires précités, pour bénéficier du régime micro-fiscal s’applique un régime réel, c’est-à-dire une imposition sur les bénéfices nets que le créateur a effectivement réalisés. Il s’agit du régime réel simplifié (21) pour les revenus commerciaux. Ce régime réel peut aussi être choisi avant d’atteindre ces seuils si l’artisan souhaite être assujetti à la TVA ou pouvoir déduire ses charges réelles si elles sont supérieures aux abattements de 71 % ou 50 % précités. Les bénéfices sont imposés à l’impôt sur le revenu (ou, sous certaines conditions et pour l’EIRL, à l’impôt sur les sociétés si le créateur a choisi ce régime (22) ).
.

B/ Pour les revenus d’activité considérés comme BNC

Le régime « micro-BNC (23) » correspond à un régime de déclaration de revenus simplifiée en deçà de 70 000 €. Pour les revenus non commerciaux, l’imposition porte sur le chiffre d’affaires (et pas sur le revenu réel comme c’est le cas de l’entreprise individuelle classique) diminué d’un abattement forfaitaire de 34% pour les charges (24) – le chiffre d’affaires sur lequel pèse l’impôt est donc de 66 % du chiffre d’affaires réalisé.
Au-delà de ce seuil s’applique le régime de déclaration contrôlée (25) pour les revenus non commerciaux. Ce régime s’applique en tenant compte de toutes les dépenses et toutes les recettes professionnelles comptabilisées au réel (déclaration contrôlée)
.

C/ Pour les revenus de droit d’auteur

S’il s’agit de recettes au titre des droits d’auteur s’applique le régime des bénéfices non-commerciaux (26) (c’est-à-dire régime « micro BNC » puis déclaration contrôlée)..
.

.
Pour ses activités artistiques, l’artiste ne peut pas bénéficier du régime de micro-entreprise puisque le régime des artistes-auteur, régime social des artistes, est rattaché au régime général de sécurité sociale pour l’ensemble des risques couverts alors que le régime micro-fiscal n’est permis que pour les personnes relevant du régime social des travailleurs indépendants(27) .
.
En revanche, pour ses activités annexes (cours par exemple) ou commerciales (vente d’œuvre), l’artiste peut bénéficier du régime de la micro-entreprise (28) car ces activités ne sont pas à proprement parler des activités artistiques c’est-à-dire qu’elles ne sont pas comptabilisées comme base de cotisation pour le régime des artistes-auteurs.
Si ses revenus sont intégralement déclarés par des tiers, il s’agit de revenus assimilés à des traitements et salaires (29) et donc soumis à l’impôt sur le revenu (30) .
.

A/ Pour les créateurs et les artisans

Le créateur ou l’artisan peut bénéficier d’une exonération (franchise) de TVA (31) selon le montant de son chiffre d’affaires (82 800 € pour les ventes de marchandises et 33 200 € pour les prestations de service).
Pour être exonéré de CFE (32) , un artisan doit effectuer principalement des travaux de fabrication, de transformation, de réparation ou des prestations de service et exercer une activité « véritablement artisanale » c’est-à-dire telle que la rémunération du travail représente plus de 50 % du chiffre d’affaire global, tous droits et taxes compris.
Pour être exonéré de cotisation foncière des entreprises, le créateur ou l’artisan doit avoir un chiffre d’affaire inférieur à 5000 € (33). Sous certaines conditions (notamment un travail manuel prépondérant), l’artisan peut être exonéré de cotisation foncière des entreprises (34).
.

B/ Pour les artistes

Les prestations et créations de l’artiste sont soumises à un taux de TVA de :
 5,5% s’il s’agit d’une livraison par l’auteur de ses propres oeuvres originales (35) ;
 d’un taux réduit de 10% de TVA (36) si ses prestations et créations relèvent du droit d’auteur ;
 d’un taux de 20 % pour celles n’en relevant pas (37) .

En outre, l’artiste est exonéré de TVA pour les livraisons de ses œuvres (38) (notamment dessins, peintures, sculptures, œuvres graphiques, œuvres d’art appliqués, œuvres photographiques) et la cession de son droit patrimonial de propriété intellectuelle en deçà de 42 900 € HT de chiffre d’affaires (39) . Ce seuil d’exonération tombe à 17 700 € pour les autres opérations de livraison de biens et prestations de service (40).
Pour être exonéré de cotisation foncière des entreprises, l’artiste doit avoir un chiffre d’affaires inférieur à 5000 € (41) . En outre, un artiste est exonéré de cette cotisation foncière des entreprises quel que soit son chiffre d’affaires s’il est peintre, sculpteur, graveur ou dessinateur (sous réserve pour ces quatre activités qu’il ne vende que les produits de son art) ou encore photographe (seulement pour la réalisation de prises de vues et la cession des œuvres et des droits d’auteur) (42) .

.

Troisième partie : un régime social distinct selon l’activité de création

.
Le régime social correspond à la sécurité sociale permettant au cotisant de bénéficier d’une assurance maladie, maternité, invalidité, décès, vieillesse et des allocations familiales.
.

.
Le régime social dont relèvera le créateur dépend de la nature de ses revenus principaux :

  • régime dit général (comme pour les travailleurs salariés),
  • régime rattaché au régime général (comme pour les artistes auteur),
  • régime dit des travailleurs indépendants.
    Ils bénéficient des prestations usuelles (assurance maladie maternité invalidité décès, assurance vieillesse, allocations familiales). Toutefois, il peut adopter un régime de micro-entreprise en-deçà de certains seuils de revenus s’il est bénéficiaire de l’ACCRE (43) ou travailleur indépendant (44) . Dans ce cas, il est exonéré de cotisations sociales dues pour les régimes d’assurance maladie, maternité, vieillesse, invalidité et décès ainsi que pour les allocations familiales.
    .

    .
    Le régime social de l’artiste est celui de l’artiste-auteur (45) si son activité le lui permet (46) (par exemple, un auteur d’oeuvres originales graphiques ou plastiques).
    D’autres artistes relèvent de régimes différents en fonction de leur statut fiscal (les « artistes libres (47) ») ou des modalités d’exercice de leur activité (par exemple, ceux exerçant leur activité avec un lien de subordination sont affiliés au régime général de droit commun en tant que salariés ou assimilés salariés (48) ). En outre l’artiste qui exerce plusieurs activités cotise pour chacune d’elle au régime dont elle relève.
    Pour être affilié au régime social des artistes auteurs, l’artiste doit répondre à divers critères :

  • créer une œuvre de l’esprit,
  • relever d’une branche professionnelle prédéfinie (49) (écrivains, auteurs et compositeurs de musique, arts graphiques et plastiques, cinéma et télévision, photographie)
  • et exercer une activité indépendante (c’est-à-dire ne pas être sous la subordination d’un employeur donnant des directives et en contrôlant l’exécution).
    Les cotisations portent sur le montant brut des droits d’auteur s’il sont assimilés à des traitements et salaire ou, s’ils ne peuvent y être assimilés, sur les revenus imposables au titre des bénéfices non commerciaux majorés de 15% (50) .

Néanmoins, le régime des artistes-auteurs ne couvre pas les risques d’accident du travail ou de maladie professionnelle (51) : l’artiste-auteur doit donc souscrire une assurance complémentaire pour ces risques auprès de la caisse primaire d’assurance maladie. En outre, le régime d’assurance vieillesse peut être complété par un régime d’assurance vieillesse complémentaire des artistes-auteurs professionnels (52) géré par l’IRCEC (Institution de retraite complémentaire de l’enseignement et de la création).
Depuis le 1er janvier 2019, cette affiliation est de droit (53) : dès que l’artiste perçoit un revenu, il bénéficie de la prise en charge des soins par l’assurance maladie car il est affilié dès la création de son activité auprès du centre de formalités des entreprises (ou dès le premier précompte). Depuis cette date également, l’affiliation – c’est-à-dire l’éligibilité au statut d’artiste auteur - est décidée par la MDA (Maison des artistes, pour les artistes auteurs d’œuvres graphiques et plastiques) et l’AGESSA (association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs, pour les autres catégories de créateurs) tandis que les cotisations sont déclarées à et versées par l’URSSAF du Limousin à partir du 1er janvier 2020. Enfin, il n’est plus nécessaire que l’artiste soit affilié à la Maison des artistes pour déclarer ses revenus accessoires (conférences, cours, etc) (54) .
.

.
Le régime social de l’artisan dépend de la forme juridique de son activité :

  • ses cotisations portent sur ses revenues salariés s’il relève du régime des assimilés salariés (55) ;
  • ses cotisations portent sur le chiffre d’affaire pour la micro-entreprise (régime micro-social) (56) voire sur le résultat de son activité pour l’entreprise individuelle s’il relève du régime de la sécurité sociale des indépendants (57) .
    .
    Dans ce second cas, le régime micro-social lui permet de s’acquitter de ses charges sociales de manière forfaitaire et de ne rien acquitter s’il n’a réalisé aucun encaissement. Le régime micro-social ouvre droit à l’assurance maladie-maternité (indemnités journalières), à la retraite de base et à la retraite complémentaire, tous trois sous conditions de revenus(58) . Par exemple, le bénéfice de l’assurance maladie n’est ouvert qu’à partir d’un revenu annuel moyen minimum (3919,20 € pour l’année 2019) et d’une année de cotisation pour l’assurance maladie-maternité. Le régime micro-social ouvre également droit aux prestations familiales.
Relire la 1ère partie de cet article "Les qualités de créateur, artiste et artisan" qui contribue à choisir un statut entre créateur, artiste ou artisan, adapté au mieux aux particularités de son activité...

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
15. article 34 du code général des impôts
16. ou en EURL avec option d’impôt sur le revenu
17. article 50-0 du code général des impôts
18. article 50.0 du code général des impôts
19. article 302 septies A ter A du code général des impôts
20. article 151-0 du code général des impôts

21. article 302 septies A bis du code général des impôts
22. article 1655 sexies du code général des impôts.
23. article 102 ter 1 du code général des impôts
24. article 102 ter du code général des impôts
25. article 96 du code général des impôts
26. article 92, 2, 2° du code général des impôts.
27. article 613-7 du code de la sécurité sociale

28. articles L. 613-7 du code de la sécurité sociale, qui renvoie à l’article L. 631-1, renvoyant à l’article L. 611-1 et donc qui s’applique aux travailleurs non salariés (sauf article L. 640-1 donc sauf ceux relevant des régimes des professions libérales tels les artistes non mentionnés à l’article L. 382-1).
29. article 93, 1 quater du code général des impôts
30. article 93, 1 quater du code général des impôts
31. article 293 B du code général des impôts
32. article 1468 (2° du I) du code général des impôts, BOI-IF-CFE- 20-30-10-20120912
33. article 1647 D du code général des impôts
34. 1° de l’article 1452 du code général des impôts
35. article 278-0 bis du code général des impôts
36. article 279 alinéa g du code général des impôts.
37. article 278 du code général des impôts
38. au sens de l’article L. 112-2 du code général des impôts

39. partie III de l’article 293 B du code général des impôts
40. partie IV de l’article 293 B du code général des impôts
41. article 1647 D du code général des impôts
42. article 1460 du code général des impôts
43. article L. 131-6-4 et article D. 131-6-1 du code de la sécurité sociale
44. article L. 131-6-4 et D. 131-6-3 du code de la sécurité sociale
45. articles L. 382-1 et s. du code de la sécurité sociale
46. article R 382-1 du code de la sécurité sociale
47. 4° de l’article L. 640-1 du code de la sécurité sociale

48. article L. 311-2 du code de la sécurité sociale
49. article R. 382-1 du code de la sécurité sociale
50. article L. 382-3 du code de la sécurité sociale.
51. article R. 743-1 du code de la sécurité sociale
52. décret n° 2015-1877 du 30 décembre 2015 relatif au régime d’assurance vieillesse complémentaire des artistes et auteurs professionnels
53. articles R. 382-3 et R. 382-16-1 du code de la sécurité sociale
54. article R. 382-26 et R. 382-24 du code de la sécurité sociale.
55. article L. 2142-1 du code de la sécurité sociale
56. article L. 613-7 du code de la sécurité sociale
57. article L. 612-1 du code de la sécurité sociale

58. article R. 382-26 (vieillesse) et R. 382-31 (maladie maternité invalidité décès) et D. 382.4 (900 SMIC) du code de la sécurité sociale
.
.

>>> Retrouvez Frank Schabaver sur sa page Facebook Isid’aaart et sur son profil Linkedin

VOUS AIMEZ CET ARTICLE, ALORS PARTAGEZ-LE!: